Selon Freud, l’interprétation du rêve est véritablement la « voie royale » menant à la connaissance de l’inconscient : la méthode de l’association libre doit permettre d’y découvrir un sens caché. Mais en clinique transculturelle, le rêve apparaît déjà interprété de l’intérieur par la culture. Comment comprendre cela ? L’auteur retrace à cet égard les apports de Géza Roheim (Les portes du rêve) et surtout de Georges Devereux (Psychothérapie d’un Indien des Plaines. Réalité et rêve est le premier compte rendu complet d’une thérapie transculturelle). Elle propose ensuite de redécouvrir un concept freudien longtemps considéré comme mineur : celui de l’élaboration secondaire du rêve. Il s’agit du remaniement préconscient de sa façade qui le rend intelligible et communicable dans le registre de la pensée diurne. C’est lui qui ordonne les choses selon la logique culturelle du rêveur, selon sa « vision du monde ». À travers la thérapie ethnopsychanalytique d’une jeune femme marocaine à Bruxelles, le rêve apparaît bien comme un lieu privilégié de ce qui se noue entre l’individu et son univers culturel. Il reste toujours le paradigme du travail psychique dans la cure et dans le transfert.
Echange avec Danièle Pierre par Sophie Haberbüsch-Sueur pour Anthropoweb
Comme vous le soulignez dans votre ouvrage, votre pratique de l’ethnopsychiatrie est récente, quel a été le déclencheur de votre ouverture à cette nouvelle perspective ?
Pourquoi aborder le sujet par les rêves ?
L’hypnose est-elle l’une des meilleures clés des rêves ?
Vous revenez sur les fondements de l’ethnopsychiatrie, et la part importante donnée par les apports de l’anthropologie et de l’ethnologie, pensez-vous que l’échange entre les sciences de l’homme est nécessaire dans le soin que vous apportez ?
D’emblée vous montrez les différences de situations et d’action entre coutumes traditionnelles déplacées dans une autre société (je pense ici à l’accompagnement à l’accouchement que vous citez en exemple), l’ethnopsychiatre que vous êtes est très vigilante avec ce contexte, pensez-vous que cette considération doit être ouverte à tous les psychologues, psychanalystes, voire jusqu’aux médecins généralistes pourquoi pas ? Ceci pourrait rejoindre cette nécessité d’éthique que vous exprimez dans la conclusion ?
Vous insistez sur l’histoire récente de l’ethnopsychiatrie, pensez-vous que la mise en commun des pratiques de chaque ethnopsychiatre peut apporter plus de sens dans la définition de votre métier et sa reconnaissance dans la psychiatrie générale ?
Table des matières
Introduction
- Les portes du rêve : Géza Roheim, précurseur de la démarche ethnopsychanalytique
- Georges Devereux : la psychothérapie d’un Indien des Plaines et les débuts de l’ethnopsychanalyse
- Freud : élaboration secondaire et « vision du monde »
- L’élaboration secondaire en clinique : fantasme, rêve et « vision du monde »
- Clef des songes, clef du transfert : pour une interprétation transculturelle
Danièle Pierre est psychiatre et psychanalyste ; depuis près de vingt ans, elle développe une consultation d’ethnopsychiatrie au centre Chapelle aux champs, (Association des services de santé mentale de l’Université catholique de Louvain).
Référence
Echange avec Danièle Pierre par Sophie Haberbüsch à propos de l’ouvrage : « Comment la souffrance se dit en rêves. Un regard ethnopsychiatrique. », 05 juillet 2012, http://www.anthropoweb.com/Echanges-avec-Daniele-Pierre-a-propos-de-l-ouvrage-Comment-la-souffrance-se-dit-en-reves-Un-regard-ethnopsychiatrique_a512.html , ISSN : 2114-821X, Le Portail des sciences humaines, www.anthropoweb.com