– Les mots de Eve –

D’une fête de Noël à un mariage marocain

Pour préparer Noël à l’Hôpital de Jour, Sarah a une idée. Elle propose de réaliser de petites sucreries pour accompagner le thé ou le café à la fin du repas. Elle nous explique qu’elle en a très souvent fait quand elle était petite à Noël avec ses parents. L’idée me séduit, plaît aussi à deux patients et un groupe se forme. Pour les courses elle nous dit « c’est simple, il n’y a besoin que de deux ingrédients, des dattes et de la pâte d’amande » : parfait ! 

Le matin de la fête, les espaces de cuisine sont investis par différents groupes qui s’affairent à la préparation de boissons, apéritifs et autres mets festifs. Nous nous retrouvons donc dans un atelier de travail, à dénoyauter les dattes, couper la pâte d’amande et façonner nos petites sucreries tous les quatre. Mais rapidement, de nouvelles personnes, curieuses, nous voient et nous rejoignent. C’est le cas de Mohamed qui lance : « C’est des dattes fourrées à la pâte d’amande ? Qui c’est qui se marie ? C’est une pâtisserie pour les mariages ! ». Sarah, étonnée, lui répond : « Ah bon ? Moi j’ai toujours fait ça à Noël ». « Si si on fait ça au bled pour les mariages ! ». Mohamed est très content de nous voir préparer ces fameuses pâtisseries. Les bruits de couloir fonctionnant parfaitement,  patients et soignants notamment d’origine arabe arrivent afin de voir par eux-mêmes ce qu’il se passe dans notre groupe et finissent par prendre part à la préparation.

« – Chez moi on fait comme ça »,  « – Tu mets trop de pâte d’amande ! – C’est normal, c’est pour moi celui-là », « – Moi j’ai toujours préféré les dattes natures, d’ailleurs si vous pouvez m’en mettre quelques-unes de côté… », « – On se croirait au bled », « – Il faut qu’on trouve qui va se marier! ». S’ensuivent des propositions de couples potentiels, des rires, du brouhaha : un moment convivial, pris entre traditions de Noël et mariage marocain.

Durant cet instant, il m’a semblé que nous étions et en France à Noël et au Maroc à la préparation d’un mariage. Tant dans l’évocation de souvenirs personnels que dans cette réalisation commune, nous partagions quelque chose d’authentique. D’ailleurs, alors que j’exprimais mon mécontentement sur l’aspect de l’une de mes dattes, je dis « Ah là là » et Mohamed me fit remarquer que ça y était, je parlais désormais arabe.

Eve